« Par le contact, on redevient humain ». Ne sous-estimons pas le grand pouvoir du toucher pour se reconnecter aux autres, pour se reconnecter à soi.
Bernard Andrieu, philosophe spécialiste du corps, le souligne :
«Une haptophobie – peur du contact physique – se développe avec l’importance accordée au monde virtuel, où la vue et la voix sont privilégiées, mais avec une sensorialité par simulation. Par exemple, avec les casques de réalité virtuelle, on touche le cerveau et on déclenche une sensation, mais cela reste une empreinte neuronale, il n’y a pas d’impact émotionnel sur la peau. C’est précisément parce que cela ne remplace pas la vraie expérience du contact physique que cette dernière sera paradoxalement de plus en plus recherchée.»
Auteur de Sentir son corps vivant (Éd. Vrin) Bernard Andrieu est à l’origine du concept nouveau d’émersiologie, une philosophie du corps qui lie le vivant et le vécu et propose de dynamiser nos sensations profondes pour changer notre schéma corporel et notre action dans le monde.
Depuis ce printemps 2020, si particulier, je suis très touchée et interpellée par cette philosophie du corps. Ne sommes-nous pas depuis trop longtemps privés de contact vrais, tangibles qui nous permettent de nous ressourcer, nous reconnecter au monde, à notre environnement ?
Pendant la période qui vient, faites le choix d’une au deux personnes en dehors de la sphère privée (avec son accord préalable, cela va sans dire). Une main sur l’épaule, une main dans le dos, se prendre par la main, un câlin … Ce contact aussi ténu soit-il augmentera le sentiment « d’appartenance existentielle » pour vous et pour l’autre.
Pour ceux·celles en dehors de la sphère, n’hésitez pas à accentuer les regards, gardez cet échange, quelques instants les yeux dans les yeux, un large sourire derrière le masque pour que les yeux sourient aussi. Plus que jamais nous avons besoin de contact avec l’ « autre ». Il·elle n’est pas devenu·e l’ennemi·e à éviter.
Sortons de notre bulle. Allons à sa rencontre.
Et quel plaisir de savoir les écoles, les écoles des devoirs, les plaines de jeux, les lieux d’accueil… enfin ouvert·e·s.
Encore quelque temps et nous pourrons enlever les masques. Pour retrouver ce plaisir de respirer à plein nez, souffler à pleine bouche, sans avoir les lunettes qui s’embuent et le bas du visage tout humide, le plaisir de voir les sourires et les expressions. Tout notre corps réagira à cette reprise de liberté.
Difficile de prévoir le futur pour les professionel·le·s qui travaillent comme moi le bien-être par le contact, le toucher en milieux scolaires ou ailleurs.
Les pratiques comme les massages en duo recevront-elles l’autorisation ? Alors qu’elles rentraient doucement dans les classes pour consolider les liens entre les élèves, valoriser l’empathie et le respect entre les enfants… les voilà mises sur le banc « de touche » pour un petit moment.
Pour l’instant, je me dis « pas grave ! ».
Il y a plein d’autres choses à faire avec les enfants pour travailler la gestion du stress, les émotions, pour apprendre à se faire confiance et asseoir une belle estime de soi, pour consolider les liens et améliorer le climat de classe… cela en gardant ses distances.
Les pratiques de relaxation, les séquences de mouvements qu’ils soient rythmés ou lents, les respirations, les méditations… peuvent tout à fait s’adapter aux exigences sanitaires du moment.
Je m’y suis attelée dès cette fin d’été en animant la formation Pause en conscience pour les éducateurs des écoles des devoirs d’Ixelles. Je continuerai cet automne avec des ateliers dans trois écoles à Schaerbeek, Jette et Berchem Ste Agathe.
D’autres ateliers pour les jeunes et en duo avec les (grands-)parents seront aussi au programme pour se retrouver et pratiquer ensemble.
Vous trouverez toutes les dates dans l‘agenda.
Les effets de la pleine conscience chez des enfants scolarisés
En attendant de nous retrouver, je vous propose de lire les résultats de la première étude francophone sur les effets de la méditation de pleine conscience chez les enfants à l’école primaire publiée début juillet 2020 par une équipe pluridisciplinaire bordelaise. Grégory Michel, professeur de psychologie clinique et de psychopathologie à l’université de Bordeaux et chercheur à l’Institut des sciences criminelles et juridiques, et coordinateur de l’étude, fait le point.
Lire la suite ici
Je vous souhaite une belle rentrée. Prenez soin de vous et des autres.
